
La grande question qui se pose à propos des énigmatiques lignes de Nazca, est bien celle de savoir pourquoi ces figures tracées sur le sol n’ont de sens que « vues du ciel »
Pour Maria Reiche, l’astronome allemande qui a consacré la plus grande partie de sa vie à l’étude du site de Nazca, ces lignes nous mettent en présence du » plus grand livre d’astronomie à ciel ouvert du monde ». Un livre dont pourtant, nous ignorons encore l’alphabet…
Pour appuyer sa thèse, elle avance que les Nazcans étaient des agriculteurs et qu’ils avaient donc besoin de connaître avec précision les dates des équinoxes, des solstices ou des éclipses : la plupart des travaux des champs sont rythmés par une connaissance précise des saisons et celle-ci ne s’acquiert que par l’accumulation d’informations sur l’astronomie.
Mais les lignes de Nazca sont-elles bien dans l’alignement des étoiles, comme plusieurs chercheurs l’ont affirmé ? Une petite partie de la mission spatiale Skylab II consistait, précisément, à photographier à très haute altitude le fameux « aérodrome de l’espace ». Le dépouillement des clichés n’a guère pu donner de certitudes. Il est étonnant de constater que certaines de ces lignes, longues de plusieurs kilomètres ne dévient quasiment pas, et rarement de plus d’un degré !

En 1968, l’astronome américain Gerald S. Hawkins s’est intéressé à ces étranges marques sur le sol. On connaît sa théorie révolutionnaire sur Stonehenge : il a fait, non sans convaincre un certain nombre de préhistoriens et d’archéologues, de l’ensemble mégalithique une sorte d’ « ordinateur astronomique » très sophistiqué. On s’attendait donc à ce qu’il confirme les théories de Maria Reiche sur le but astronomique des lignes de Nazca.
Entouré d’une équipe d’experts et des meilleurs techniciens en informatique, avec le concours de l’armée de l’air péruvienne et des autorité locales, Gerald S. Hawkins a minutieusement relevé, puis analysé, toutes les données matérielles (mesures, orientations, etc.) disponibles sur le site.
Avant lui, Maria Reiche avait pendant des années effectué une partie de ces calculs, mais sans l’aide de l’informatique. Les ordinateurs, eux, ont pu les refaire en quelques secondes. On estime que le nombre des opérations exigées par les travaux d’Hawkins aurait pris… cinquante ans de la vie d’un homme si elles avaient été effectuées par des mathématiciens dépourvus de matériel !

Le programme utilisé par l’équipe d’Hawkins était sensiblement le même que celui dont on s’était servi à Stonehenge : il s’agissait de mettre les lignes en relations avec les positions de certains astres aussi visibles et évidents que le Soleil à quelques moments précis de l’année, comme les solstices ou les équinoxes. 71 lignes droites étaient ainsi analysées, de même que 21 flèches de direction.
Les lignes étaient-elles pointées vers des astres précis ? Rapidement, Gerald S. Hawkins devait admettre qu’il n’y avait aucune corrélation positive entre les lignes de Nazca et un quelconque corps céleste. Seules quelques lignes correspondaient à peu près exactement avec certaines positions du Soleil à telle ou telle période de l’année.
Les partisans de la théorie « astronomique » ne désarmaient pourtant pas et attribuaient le manque d’exactitude des lignes aux méthodes sommaires utilisées par les peuples d’Amérique du Sud pour observer le ciel. On sait que les Incas utilisaient des calendriers cosmiques assez rudimentaires, fondés sur des alignements d’édifices regroupés selon les directions précises. Toute l’étude de la relation entre ces alignements incas, antérieure de sept siècles aux dessins de Nazca, et les lignes laissées par les Nazcans reste à faire.

Les lignes de Nazca ne sont d’ailleurs pas les seules en Amérique du Sud. On en connaît, en Bolivie, qui atteignent 32 km de long sans dévier, à travers des terrains très accidentés parsemé de sanctuaires qui sont pour nous sans signification. Quand nous parviendront à élucider la symbolique magique des peuples précolombiens, sans-doute seront nous en mesure de percer le mystère de Nazca. Entre les hommes et les dieux se nouaient alors des liens privilégiés, qui nous échappent complètement. Peut-être ces lignes ne sont-elles que des moyens de guider les hommes vers les lieux de culte. Peut-être ces animaux dessinés sur le sol ne sont-ils que des hommages à des dieux supposés célestes.
Justement, cette hypothèse « céleste » a fait couler beaucoup d’encre. Erich von Däniken, un ancien hôtelier suisse, a bâti une véritable fortune en publiant un livre, qui allait être un best-seller, où il avançait que les lignes de Nazca n’étaient que des pistes d’atterrissage préparées par les humains par les extra-terrestres.
Cette théorie, séduisante à première vue, est cependant battue en brèche par quelques arguments qui relèvent de la plus élémentaire logique. Selon l’astronome américain Carl Sagan, faire de ces lignes des pistes d’atterrissage revient à montrer un certain « chauvinisme temporel » : en effet, pourquoi imaginer que des êtres venus de l’espace, et donc maître d’un certain nombre de technique de déplacement sophistiquée, auraient besoin de pistes comme nos avions modernes ? Ces astronautes qui posséderaient donc le pouvoir de voyager à des dizaines, voire des centaines d’années-lumière de leur planète d’origine, se passeraient volontiers d’un aérodrome aussi rudimentaire.
Car, c’est une autre évidence, il n’est guère facile de se déplacer sur ces lignes creusées dans un sol très mou interdisant tout déplacement rapide. Selon Maria Reiche, les astronautes se seraient irrémédiablement « crachés » sur ces pistes.
Pourquoi après tant de siècle, les lignes du désert de Nazca sont-elles encore visibles ? La réponse est, encore une fois de plus, relativement simple : le climat de la pampa est extrêmement sec et le soleil y brille plus de dix mois par an. Les pierres des pistes et des dessins emmagasinent une chaleur qui forme une sorte de halo quasi permanent au-dessus des figures, lesquelles sont ainsi protégées des effets du vent.

En 1975, un aviateur américain, Jim Woodman, fondateur de la compagnie Air Florida, se passionne pour les mystères de Nazca. Pour cet homme d’affaires, qui connaît très bien l’Amérique du Sud et qui a d’excellentes relations dans la plupart des pays, les Nazcans se sont servi de ballons gonflés à l’air chaud pour surveiller le tracé de ces figures.
Il gagne rapidement le soutien de l’Office du tourisme péruvien et s’adjoint le concourt d’un anglais spécialiste du ballon captif, Julian Nott. Son idée est renforcée par la trouvaille, sur des poteries archéologiques du site, de curieux dessins qui évoquent des ballons, dont la nacelle aurait une forme de gondole. Dans les tombes retrouvées à Nazca, on a également découvert des étoffes qui auraient pu servir à la construction de tels ballons. De plus, à certaines extrémités des grandes pistes, Jim Woodman devait mettre en évidence la présence de piles de cailloux ou de traces caractéristiques de matériaux soumis à de fortes chaleurs.
Il s’agissait donc de bâtir un ballon, Condor 1, en respectant strictement le type de matériau utilisé à l’époque : la toile trouvée dans les tombes, lourde et dangereusement poreuse à froid, mais excellente une fois le tissu obturé par la suie de fumée, était facile à reconstituer. Pour la nacelle, les motifs des poteries servirent de modèles…
Restait à voler. En décembre 1975, le décollage se passa sans trop de problèmes : les deux aérostiers sont assis à califourchon sur une gondole faite en roseau. ils commencent à s’élever dans les airs… Leur vol sera cependant de courte durée car leur montgolfière primitive s’écrasera peu après !
Peu importe : une possibilité s’ouvrait qui, admise par le milieu scientifique, pourrait pulvériser notre conception moderne de l’aviation. L’expérience demanderait pourtant à être renouvelée pour confirmer l’hypothèse envisagée.

Enfin, pour ajouter au trouble, certains chercheurs ont fait observer que les lignes pourraient n’être que la concrétisation de ces immenses courants telluriques qui traversent la Terre, et les grands sites mystérieux en constitueraient alors autant de points de repère : Est-ce un hasard si les sites d’Ica, de Nazca et de Tiahuanaco, éloignés de plusieurs milliers de kilomètres, se placent sur une même ligne droite ?
Plus troublant encore reste le fait qu’une perpendiculaire tracée au centre exact de cette ligne conduit tout droit à Cuzco et à Sacsahuaman, la cité sacrée et la forteresse des Incas.
De plus, Nazca paraît se dérober en permanence à nos critères rationnels de recherche et à notre logique scientifique. Bien entendu, et à notre logique scientifique. Bien entendu, des ovnis ont été vus sur le site, avec des humanoïdes silencieux et énigmatiques.
Le secret de ces lignes est encore bien préservé. Peut-être plus pour longtemps. Non parce qu’il sera mis au jour, mais parce que les signes de ce secret auront disparu : trop célèbre, les lignes sont aujourd’hui sérieusement dégradées par l’afflux des visiteurs. Certains jeunes Péruviens profitent des accidents de ce terrain meuble pour faire du moto-cross.
Pourra-t-on sauver cet émouvant et fascinant symbole du savoir caché des peuples précolombiens ?
Extrait de » Inexpliqué » 1981
Votre commentaire