
Aimez-vous Brahms est le roman d’un dernier amour. Paule a trente-neuf ans ; elle est décoratrice et divorcée. Son amant, Roger, tout à ses affaires et à ses caprices, lui rend des distraites visites qu’elle attend, fidèle et dolente. Sa vie s’écoule ainsi sur fond de bonheur triste. C’est à ce moment-là, au moment où elle perdait sa propre trace, qu’elle rencontre le fils d’une riche cliente, Simon van den Besh, de quinze ans son cadet.
Il est beau, nonchalant et enfantin ; il s’éprend d’elle, la courtise ; elle regarde de loin son attendrissement, ses efforts, jusqu’au jour où il la conquiert, en l’invitant à un concert salle Pleyel. S’ensuivront plusieurs semaines où elle se laisse aller à la passion qu’elle inspire au jeune homme, et à laquelle elle ne répond pas sans réticence ; jusqu’au jour où elle comprend que sa liaison avec Roger est plus forte que tous les élans de jeunesse que Simon a voulu lui rendre.
Elle ignorait pourquoi. Peut-être parce que les efforts qu’elle avait faits pour leur amour depuis six ans, ces incessants, ces douloureux efforts lui étaient enfin devenus plus précieux que le bonheur.
Elle renverra donc Simon qu’elle ne peut s’empêcher d’envier pour « ce chagrin si violent, un beau chagrin, une belle douleur comme elle n’en aurait jamais plus », et retrouve Roger, ce « quelque chose d’inéluctable » dans sa vie, où il ne sera désormais question que de garder, plus de prendre… Simon, Simon, et elle ajouta sans savoir pourquoi : Simon, maintenant je suis vieille, vieille… »
Extrait
Paule contemplait son visage dans la glace et en détaillait les défaites accumulées en trente-neuf ans, une par une, non point avec l’affolement, l’acrimonie coutumiers en ce cas, mais avec une tranquillité à peine attentive. Comme si la peau tiède, que ses deux doigts tendaient parfois pour souligner une ride, pour faire ressortir une ombre, eût été à quelqu’un d’autre, à une autre Paule passionnément préoccupée de sa beauté et passant difficilement du rang de jeune femme au rang de femme jeune : une femme qu’elle reconnaissait à peine. Elle s’était mise devant ce miroir pour tuer le temps et – cette idée la fit sourire – elle découvrait que c’était lui qui la tuait à petit feu, doucement, s’attaquant à une apparence qu’elle savait avoir été aimée.
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